samedi, 20 mars 2021 18:17

Guerre des Ases et des Vanes

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Dans  Edda  poétique  de   Régis  Boyer

[…]De toute  manière, une quadruple tradition nous  livre  le souvenir  d’une  longue, violente  et  indécise  bataille entre  Ases et Vanes, dont  l’importance est capitale.  La  Völuspa  , strophes15 et suivantes  (21 à  24  sur  wikipedia), laisserait entendre   que l’enjeu  était  Gullveig dont le  nom signifie  « ivresse d’or »,qui serait  une sorcière  que  se disputent  les  Vanes et  les  Ases, lesquels essaient   à trois reprises et sans  résultat  de  la  brûler. La  Inglinga Saga, nous  l’avons  vu   propose  une  explication géographique  et   historique qui vaut  pour  son  ingéniosité (p.155).  Les  Skaldskaparmal l’évoquent  également  très  succinctement (p.116). Enfin , Saxo  Grammaticus présente  un  récit qui n’est  qu’un amalgame des données  précédentes.

Gullveig by Frølich

L’opinion  reçue a  longtemps été qu’un  substrat historique justifiait cet  épisode, dont  l’importance  est  capitale.  On  a  pensé à une série  de  vagues de   migration venant de la  mer  noire à  la conquête  du  Nord . Les Vanes  auraient  investi le  monde   nordique des  Ases tout en  composant  avec  eux. La thèse  brillante   de   Georges  Dumézil (Les  Dieux des  germains) remonte aux  sources  indo-européennes(sinon  à  celles de  toute religion) : Toute religion divinise les trois grandes  fonctions sociales, prêtre,  guerrier  et  paysan ; mais si  les deux  premières  peuvent naturellement faire  bon  ménage,  il y a  d’évidentes  incompatibilités entre elles et  la troisième. Il est donc  inévitable  qu’un conflit éclate un jour, indécis  comme  la vie  même ,  puisque  chacune  de   ces  fonctions  est  indispensable  à  la vie  même  en  société.

Sans  entrer  dans  le détail  de   la démonstration,  il  est bien  sûr, étude  comparée des religions  à l’appui,  que  toute  l’histoire scientifique  ou  mythique, est  une série  de  compromis entre  le laboureur et  le  pasteur d’une  part,  et  d’autre part le  rêitre et le   prêtre.  Pourtant   cette  explication rend  mal  compte       des ambiguïtés qui  subsistent autour de  certains dieux, (Thorr  ou  Odinn par  exemple), dont  les fonctions ne sont  pas assez  nettement  délimitées pour qu’on  les  intègre  sans ambages  à l’une des trois catégories. Et  d’un  autre  côté, la présence  fréquente,  parmi  les  inscriptions  rupestres scandinaves  remontant  à la très  haute  antiquité,  de scènes plus  ou  moins  orgiaques, de  sacrifices  rituels ou de  représentations dramatiques évoquant  la  mort  de Baldr, le  sacre  du printemps, etc… , nous  inciterait  à penser que  les Vanes appartiendraient  à une  religion primitive, agricole, sensuelle, recouverte  par  le culte  des  ases,  plus récent, plus viril,  plus guerrier et spirituel. En  tout  état de cause, l’image des dieux que  nous connaissons  aujourd’hui est  impure  à  souhait et ne peut se  regarder que comme ces  photographies imprécises   où toute  une série  de  vues différentes  auraient   impressionné la  même  pellicule. Refaire  la  géologie de  ces strates  successives  est une  tâche  ardue .[…]

La guerre des  Ases et des  Vanes  selon l’histoire  mythique des  rois de  Norvège l’Inglinga Saga : (Chapitre  4)

 

Odinn  marcha  avec  une armée  contre  les  Vanes,  mais ils firent  bonne  contenance et  défendirent  leur   pays, et  les uns et  les autres remportèrent  la victoire à tour de  rôle. Chacun  pilla le  pays de   l’autre  et  y fit  des ravages. Mais  quand ils s’en furent  fatigués de  part et  d’autre, ils  fixèrent  entre eux une réunion de  conciliation, firent  la  paix  et se  remirent  des  otages. Les Vanes   remirent le meilleur  de  leurs hommes, Njördj le  Riche et son  fils  Freyr, et les  Ases , en  échange, celui qui  s’appelait  Hoenir, déclarant qu’il avait tout ce qu’il fallait  pour  faire un chef.  C’était  un  homme  de  grande  taille et très beau. Avec  lui  les Ases envoyèrent celui qui  s’appelait  Mimir, le  plus sage  des  hommes, et  les  Vanes remirent en  échange  celui qui  était le plus avisé de  leur  troupe.  Il s’appelait  Kvasir. Quand Hoenir arriva dans  le   Vanaheimr, il fut aussitôt  fait  chef. Mimir  le conseillait  en   toutes choses. Mais quand Hoenir se  trouvait   dans  les assemblées ou les  réunions et que Mimir n’était  pas  à  proximité, et qu’on lui soumettait quelque affaire difficile, il répondait  toujours  la  même chose : « Que  d’autres  décident », disait-il. Alors les  Vanes soupçonnèrent  que  les  Ases  avaient  dû  les tromper  dans l’échange. Ils  prirent Mimir  , le  décapitèrent  et  envoyèrent sa tête aux  Ases. Odinn  prit  la tête, l’oignit  d’herbes qui  ne  pouvaient   pourrir,  l’enchanta  et  l’ensorcela de telle  façon qu’elle se  mit  à  lui  parler  et  à lui dire  beaucoup de  choses secrètes. Odinn  institua  Njördr  et   Freyr prêtres sacrificateurs et ils furent  Diar  avec les  Ases. Il  y avait une fille  de  Njördr, Freyja. Elle fut prêtresse  sacrificatrice. Elle enseigna  la première  aux  Ases le Seidr, comme les  Vanes en  avaient   la coutume. Quand  Njördr  était  chez les Vanes  il avait   épousé sa sœur, car  telles  étaient  les  lois dans  ce  pays –là. Leurs enfants étaient   Freyr  et   Freyja . Mais  il était  interdit   aux  Ases de  se  marier  entre  parents si  proches.

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